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2024-2025

Licia Demuro

Lauréate 24-25

Licia Demuro, curatrice et critique d’art, est la lauréate de l’édition 2024-25 de la résidence de recherche en pratiques curatoriales à l’ésadhar.  Sa pratique curatoriale l’a amené à développer une recherche fondée sur les répercussions formelles, conceptuelles et sociales du modèle productiviste dans le champ de l’art. Au fil de ses projets, elle s’est ainsi intéressée aux pratiques artistiques basées sur les protocoles et les modes d’emploi, les low-technologies et d’autres expériences de travail collectif.

 

En 2021, elle contribue à la création d’Octopus – Coopérative de travailleur(ses) de l’art où elle devient curatrice associée. En 2023, elle commence une collaboration avec l’Hebdo du Quotidien de l’Art pour lequel elle réalise une série d’enquêtes portant sur des sujets à l’intersection d’enjeux artistiques et sociétaux. En 2024, elle rejoint le comité curatorial du 68e Salon de Montrouge qui se tiendra en février 2025. À l’occasion de son année de résidence de recherches en pratiques curatoriales à l’ésadhar, elle envisage de questionner et de cultiver la notion de biens communs »au travers de l’acte créatif. Pour ce faire, elle s’appuiera sur l’écosystème vivant, social, poétique et économique propre au territoire, afin d’explorer le pouvoir du récit à mettre en forme l’action collective. Il s’agira de questionner : comment le récit permet-il à des situations d’émancipation de se structurer et de se perpétuer ? Et comment l’art peut-il y contribuer ? Sa recherche portera donc sur l’exploration de la possibilité de « faire récit » en « faisant œuvre », et vice-versa. L’ambition de raconter les « communs », tout en en prenant soin, et ainsi de les faire exister durablement dans l’imaginaire collectif, reposera sur des tentatives de tisser ensemble les mots, les gestes, les rêves et les savoirs qui habitent les lieux. Les formes que prendront ces tentatives pourront être des enquêtes exploratoires sur les relations et les inter-dépendances présentes au sein du quartier, mais aussi des débats chorégraphiés, des lectures attentives (propres aux méthodes anglo-saxonnes du close reading), des marches et des arpentages en milieu périurbain, des cueillettes, des correspondances et d’autres messages inscrits dans l’espace public.

 

En somme, l’axe fondamental de cette recherche reposera principalement sur l’idée empruntée à Tim Ingold de « se mettre en chemin avec ce que l’on cherche à connaître » en laissant que l’action d’un groupe fusionne avec son propre récit, de façon à « déplacer la notion moderne selon laquelle le savoir devrait être produit de manière distanciée ». Dans ce sens, il sera question d’imaginer collectivement des nouvelles formes d’épistémologies créatives, en traduisant les ressources et relations endogènes en récits spatialisés, ouverts, mouvants et pluriels.  La résidence de recherche en pratiques curatoriales est un partenariat entre l’École supérieure d’Art et Design Le Havre-Rouen, le C-E-A l’Association française des commissaires d’exposition et le Centre André-Malraux, avec le soutien de la DRAC Normandie et de la ville de Rouen.

 

Mettre Racine

À l’heure où l’industrie culturelle se confronte à la limite d’un « développement infini dans un monde fini » (Bernard Charbonneau), la curatrice en résidence Licia Demuro explore comment les principes de décroissance influencent les pratiques artistiques contemporaines. Ces réflexions interrogent les processus de production, l’origine des matériaux et l’impact des gestes créatifs, suscitant un retour aux techniques anciennes et aux savoir-faire artisanaux. Elles encouragent aussi la fabrication d’outils à partir des ressources locales, dans une logique d’« ancrage dans le quotidien » (Geneviève Pruvost).

Le projet Mettre racine a ainsi proposé d’appréhender la confection de couleurs, papiers et supports comme une recherche esthétique à part entière, valorisant des processus invisibilisés par l’industrialisation et révélant leur potentiel poétique et social. Cette démarche implique une attention aux communs naturels et à leurs modes de gestion. À la Grand’Mare, la forêt urbaine et les rebuts végétaux des espaces verts et du CFA Simone Veil ont constitué le terrain de cette exploration.

Les artistes François Génot, Albane Hupin et Christelle Enault ont animé des workshops mêlant habitants et étudiants, transformant leurs pratiques en moments de fabrication collective et créant des « œuvres-outils » activables par tous. La résidence s’est conclue par le Micro festival de dessin, conçu par Marie Glaize et Louis Clais, où ces outils ont été expérimentés par le public.